On aimerait y croire. Vraiment. On aimerait se dire qu’il suffit de faire apparaître Snoopy en haut de l’écran, avec sa casquette de détective et ses oreilles qui flottent au vent, pour que tout le reste suive. Que la magie revienne, que la douceur de l’enfance se reforme pixel par pixel, que les souvenirs se remettent à parler. Mais non. Snoopy & The Great Mystery Club, c’est une de ces tentatives trop appliquées, trop conscientes d’elles-mêmes, qui essaient de réveiller quelque chose — et finissent surtout par rappeler pourquoi ça dort.
Plateformes :PS5
Développeur : Cradle Games
Éditeur :GameMill Entertainment
Sortie : 10 octobre 2025
Le jeu est pourtant beau. C’est la première chose qu’on note, la plus évidente. L’esthétique est fidèle, les décors sont soignés, les couleurs douces. Tout sent la peinture pastel et l’après-midi pluvieux. Il y a du cœur dans la reconstitution, un respect évident de l’œuvre originale. Snoopy est là, Woodstock aussi, et toute la bande des Peanuts se promène dans une campagne américaine d’école primaire, entre trottoirs vides, rivières mignonnes et forêts d’automne qui sentent les feuilles mortes et le chocolat chaud.
Mais dès que les personnages se mettent à parler… ou plutôt à ne pas bouger du tout en parlant, on entre dans une drôle de zone. Les visages, parfaitement figés, regardent dans le vide comme s’ils attendaient un patch qui ne viendra jamais. Les bouches ne bougent pas. Les expressions sont bloquées.
Charlie Brown a l’air de s’interroger sur sa propre existence chaque fois qu’il ouvre la bouche, et Lucy semble constamment en train de juger le joueur pour avoir lancé ce jeu plutôt que de regarder la série animée sur Apple TV. C’est ce qu’on appelle la vallée dérangeante de l’innocence : ce moment étrange où des personnages trop familiers deviennent un peu… inquiétants.
Quant au gameplay, il se veut accessible. Ce qui, dans l’absolu, n’est pas un mal. Le problème, c’est que l’enquête est tellement simplifiée qu’elle se résume à une série de va-et-vient : parler à untel, aller ramasser une chaussette, revenir montrer la chaussette à quelqu’un d’autre, constater qu’il faut maintenant aller chercher la deuxième chaussette, puis revenir. L’écriture tente de sauver l’ensemble avec quelques répliques gentilles, mais tout est trop sage, trop plat, trop propre. Le mystère n’a jamais vraiment le droit d’exister. À aucun moment on ne doute, on ne réfléchit, on ne s’interroge. C’est un chemin fléché, balisé, entouré de panneaux « Attention, plaisir contenu ».
Et c’est là que le bât blesse : on voudrait que le jeu s’adresse aux enfants, mais rien dans sa structure ne semble vraiment pensé pour eux. C’est lent, verbeux, figé. L’humour est là, parfois, mais loin derrière la série télé actuelle, bien plus vive, plus intelligente, plus touchante. Les phases d’enquête manquent de rythme, les personnages secondaires semblent décoratifs, et même Snoopy — pourtant censé être l’âme du jeu — se contente souvent d’observer sans intervenir.
Alors on avance, doucement. On termine les chapitres. On regarde les paysages. On écoute la petite musique un peu triste, un peu fade. On cherche ce qu’on aurait aimé ressentir. Mais au lieu de la madeleine de Proust, on tombe sur un biscuit trop sec, mal cuit, et vaguement périmé. Ce n’est pas mauvais. Ce n’est même pas désagréable. C’est juste… décevant. On sent l’envie de bien faire. On sent le respect de l’univers. Mais tout cela reste coincé à la surface, comme un livre d’enfant trop lourd pour ses pages.
Snoopy & The Great Mystery Club n’est pas un scandale. Ce n’est pas un ratage complet. C’est un hommage maladroit, un peu tiède, qui n’ose pas faire pleurer ni vraiment faire rire. Et c’est bien là son problème : il veut rester sage. Il veut plaire à tout le monde. Il finit par ne laisser de traces chez personne. Snoopy mérite mieux. Les enfants aussi.
MON AVIS
On ne demandait pas la lune. Juste un petit retour au calme, une aventure simple mais bien menée, un jeu capable d’attraper l’esprit des Peanuts sans l’enfermer dans un musée. Mais à trop vouloir respecter l’image, Snoopy & The Great Mystery Club oublie de lui redonner vie. C’est un jeu qui ressemble à un vieux dessin encadré : joli, plein de souvenirs… mais figé. L’âme de Schulz n’est pas absente, elle est juste coincée dans un moteur de jeu trop rigide, dans un design trop prudent. Et pendant qu’on cherche un indice de plus, qu’on refait une boucle de dialogue déjà lue, on se surprend à regretter d’avoir cliqué sur « Nouvelle partie ». Ce n’est pas un mauvais jeu. C’est pire : c’est un jeu qu’on oubliera, alors qu’il avait tout pour rester.
MOYEN
Points forts
- Une direction artistique fidèle et vraiment mignonne
- Snoopy reste Snoopy, et ça compte
- Quelques dialogues qui font mouche
Points faibles
- Visages figés, expressions absentes
- Gameplay d’enquête ultra-simplifié
- Le prix de lancement
Test effectué sur :
PC (Steam)
