CREEP

En 2005, c’est une secousse, un séisme, que dis-je, une explosion. La phrase tombe comme un couperet aiguisé a l’arrière du crâne des lecteurs des Cahiers du Cinéma. « Le film d’horreur de l’année ». Les Cahiers vont même jusqu’à assumer la phrase symbolique au sommet de l’affiche du film. Sacré promesse putain ! Alors, qu’en est-il du film ? Est-il premier sur le podium face aux concurrents de cette même année ? Peut-on dire « bien vu » à un aveugle suite à sa remarque pertinente ? Tant de questions pour si peu de réponses.

2005, année gore
C’est l’année de Saw 2 qui fait l’exploit d’être aussi bon que le premier. The Descent qui pour moi est une référence de narration. The Devil’s Reject qui propulse Rob Zombie et sa famille Butterfly. Et au milieu de tout ça : Creep de Christopher Smith. Pas facile de se faire une place au milieu de cette année plutôt faste : Land of the dead, Hostel, Calvaire ou encore Hard Candy.

Ça parle de quoi ?
À Londres, par une froide nuit d’hiver, à minuit, à la sortie d’une soirée chic copieusement arrosée, Kate guette vainement un taxi avant de se résoudre à prendre le dernier métro. Sous l’effet de l’alcool, la jeune femme ne tarde pas à s’assoupir sur le quai. À son réveil, la station est déserte. Va s’en suivre une descente au enfer dans un lieu de plus en plus labyrinthique pour ne pas dire cryptique. Le scénario fait clairement référence aux films gore des années 70. Le grain de l’image et l’absence totale d’effets spéciaux saura faire la différence.

Le rythme
Premier point fort du film. On va à l’essentiel tout le temps. On croise bien des personnages sans pour autant s’encombrer de sous-intrigues inutiles. Chaque situation va en amener une autre et surprendre sur bien des points. C’est un métro lancé à toute vitesse qui saura freiner au bon moment pour nous offrir une fin intelligente et imparable. J’y reviendrais plus bas.

Les lois de la mise en scène
Creep ne va pas chercher les plans parfaits, mais plutôt ce qui saura nous mettre mal à l’aise. Le métro londonien n’aura jamais été aussi grand et labyrinthique. Le personnage de Kate va littéralement se faire aspirer par le lieu. J’irai même plus loin, le métro est un personnage a part entier. Il respire, avale et recrache les âmes qui s’y perdent.

La fin justifie les moyens
En règle générale, les films de genres que l’on retiendra plus longtemps que les autres ont des fins particulièrement réussies. Les exemples ne manquent pas et je pourrais justement citer The Descent sorti la même année ou même eXistenZ de Cronenberg. C’est capital d’avoir une conclusion forte et souvent très nuancée par rapport au reste du film. C’est ce que réussi Creep avec une simplicité déconcertante. Une fin qui marque et qui fait réfléchir. Un coup de génie.

Horreur sociale
Aussi cru que puisse être le film, il va garder un caractère social très marqué du début jusqu’à la fin. Comme Alice tombant dans le trou du lapin, Kate va s’enfoncer et faire des rencontres qui auront des répercussions sur sa vision du monde. Sans spoil, elle va croiser un sans-abri qui aura besoin de se confier sur sa situation. Elle s’en foutra royalement et en paiera le prix avec le temps.

Casting
Franka Potente et Vas Blackwood sont très bon dans leur rôle et sont même parfois à deux doigts du cabotinage. Rien à dire au niveau des interprétations. La suite du casting n’est pas en reste.